Prêtre en temps de confinement …

Le jeudi saint nous donne de faire mémoire de l’institution de l’Eucharistie et du sacerdoce.

Ce soir, nous rendrons grâce pour le don de l’Eucharistie.

Ce matin je vous propose quelques lignes sur notre vie de prêtre en temps de confinement …

 

Je vous partage cela en toute simplicité puisque le jeudi saint nous donne de rendre grâce à Dieu pour notre appel à être prêtre …

J’ai d’ailleurs pour la première fois partagé au prêtre qui m’accompagnait mon désir de rentrer au séminaire un jeudi saint (en 1985 …) sans que cela ait été choisi (que ce soit un jeudi saint … !)

 

En ce jeudi saint 2020 notre mission se poursuit bien sûr tout en étant vraiment bouleversée ; nous ne sommes plus auprès de nos brebis mais « à distance » …

Il nous manque profondément la joie de rassembler la communauté, de la rencontrer par vos visages, de vous donner les sacrements …

La foi de l’Eglise est tellement enracinée dans le mystère de l’incarnation que tout passe par des gestes, des signes, un toucher, un voir, une parole … Or tout cela n’est plus rendu possible …

 

Bien sûr les moyens techniques modernes nous permettent de continuer à « sentir l’odeur des brebis » ; nous partageons avec vous vos peines, vos combats et aussi vos joies …

Nous intercédons pour vous, pour les personnes malades, défuntes, ceux qui sont isolés et tous ceux qui oeuvrent pour le bien commun, si nombreux …

Nous rendons grâce pour tout ce qui se révèle de très beau en chacun de vous dans ces moments où nous sommes comme « mis à nu » …

Nous sommes heureux de prier avec vous lors des offices que nous vous proposons …

Il nous arrive aussi d’être inquiets pour vous : comment la foi des brebis plus fragiles va-t-elle se maintenir ? …

 

Au fond de tout cela nous savons bien que ce confinement est un acte de charité pour que la maladie si terrible ne se transmette pas ;  Or, la charité : « Elle excuse tout, croit tout, espère tout, supporte tout … » (1 Co 13, 7)

Nous apprenons à placer la charité par dessus tout …

Le jeudi saint n’a rien d’autre à nous dire que cela …

 

Ces combats et ces peines que vous vivez, nous les vivons nous-mêmes ; nous sommes bien à vos côtés dans nos impatiences, nos interrogations sur les prochains mois, nos inquiétudes diverses …

Nous voulons aussi tirer profit de ce temps qui nous est donné pour prier, être davantage avec Celui qui nous appelle non plus ses serviteurs mais ses amis (Jean 15,15) en ajoutant : « Je vous dis tout cela pour que ma joie soit en vous et que vous soyez comblés de joie … » (Jean 15, 11)

 

Ce temps particulier de confinement, qui est presque un temps d’arrêt (malgré toutes nos petites activités … !), nous donne de percevoir que l’unique berger, Celui qui conduit son Eglise, c’est bien le Christ ; et cela nous aurions pu l’oublier ! Il était temps sans doute que nous le réalisions davantage …

C’est Lui à qui nous pouvons nous abandonner : car c’est certain nous ne savons pas bien quand nos assemblées pourront se réunir, se retrouver joyeuses et priantes, ensemble …

Alors nous nous confions et nous vous confions à Lui ! En demandant la grâce de l’abandon, de la confiance !

En ce jeudi saint, s’il y a bien une certitude que Jésus a voulu faire découvrir à Pierre c’est que « le chef » c’est lui, le Christ ! Nous entendons l’injonction de Jésus : « Laisse-moi passer devant … »

 

En ce jeudi saint 2020, ce jeudi saint si particulier, je viens donc rendre grâce d’être prêtre, de manière plus dépouillée je l’espère grâce ce confinement, plus proche du Christ je le désire …

Il nous faut mourir à nous-mêmes pour vivre davantage, vivre véritablement …

Je rends grâce aussi car je réalise davantage encore que toutes nos Eucharisties sont un cadeau ; peut-être que j’y étais trop habitué ?

Je rends grâce pour la part du peuple de Dieu qui m’est confié …

Dans ce manque que nous connaissons tous en ce temps de confinement, que jaillisse en moi l’action de grâce pour la beauté de ce que je vis depuis tant d’année, depuis que je suis prêtre, pour ce que le Christ a fait et continue de faire !

Car là est l’essentiel … C’est Lui qui passe devant ! C’est sa Pâques …

Là est le secret de la joie ; là est la porte pour que j’entre dans le triduum pascal …

Père Patrice Guerre, curé de l’ensemble paroissial Saint Pothin – Immaculée Conception