Quelle est cette Galilée, Ô Ressuscité, où tu nous donnes rendez-vous, au matin de Pâques ?

Où devons-nous aller pour Te retrouver, ô Seigneur ? Nous ne supportons plus ton absence. Pourquoi ne te donnes-tu pas à Te voir ?  Nous aurions tant aimé  te voir au moins une fois avant que tu ne disparaisses de nos yeux !

Peut-être parce que tu veux que nous vivions d’une Promesse.

Tu refuses que les saintes femmes  te retiennent … D’ailleurs, il nous faut comprendre que nul ne pourra plus te retenir. Que le temps où tu étais livré aux hommes, lié, ligoté, confiné, emprisonné, cloué, fixé à un bois est définitivement révolu.

Ta Résurrection Ô Jésus  ne débouche que sur une PROMESSE : celle de Te revoir en Galilée.

Mais quelle est aujourd’hui pour nous, cette Galilée ? Où devons-nous nous rendre ? Où Te chercher ? au tombeau ? Mais Tu n’y es plus. Où Seigneur pouvons-nous, devons-nous, aller Te retrouver ?

Devons-nous fuir la ville où ont eu lieu les terribles événements, et aller errer loin d’elle dans la campagne … vers un petit village, inconnu (Lc 24, 13) ? Vers où conduire nos pas ?

Nous sommes hagards, désorientés, perdus ; quand nous avons tapé « Galilée » sur notre GPS il ne nous a rien indiqué, il n’a pas trouvé. Nous pensions que c’était nous qui devions aller vers Toi, et nous n’avions rien compris : nous ne savions pas que c’est Toi qui promettait de venir sur nos routes, à notre rencontre (Lc 24, 15).

Qu’il nous fallait nous mettre en route, et à plusieurs,  et que Toi-même, Tu nous rejoindrais pour marcher à nos côtés, afin que nous puissions Te dire, à Toi l’inconnu, l’étranger d’un soir, nos désespérances, notre nuit, que nos étoiles s’étaient éteintes,  que nous ne savions pas même où nous diriger …

Il fallait bien Seigneur que tu meures pour pouvoir te rendre présent à tous, à travers l’espace, à travers le temps.

Ta Résurrection nous ouvre à Ta Présence. Si tu n’étais pas Ressuscité, tu ne serais pas présent en Chine, en France, en Papouasie, chez les Esquimaux … mais d’abord, et de façon totale, dans tes sacrements, et en tout premier dans l’Eucharistie.

« Là où deux ou trois seront réunis en mon nom, je serai au  milieu d’eux. »

Le Christ Ressuscité n’a pas dit aux saintes femmes devant le tombeau : « Allez dire à Pierre qu’il se rende en Galilée … » Mais : « Allez dire à mes frères,  de se rendre en Galilée … » Le Ressuscité demande à ses disciples de se rassembler afin et avant d’aller ensemble à sa rencontre. Il veut déjà nous constituer en une cellule de sa future Eglise.

Les conditions pour Voir le Seigneur Ressuscité, c’est d’être rassemblés à plusieurs, réunis en petit communauté (même deux …)  en son Nom  et de se mettre en route ensemble. Le Ressuscité nous veut en  « famille fraternelle’’ unie dans le but de prendre le chemin  conjointement pour aller à sa rencontre et Le trouver.

Les conditions de possibilité  de rencontrer le Ressuscité  sont  1) de se réunir et 2) de se mettre en route : pas de rester à se regarder dans les blancs des yeux.

Mais, Seigneur, en ce moment, nous ne pouvons pas nous réunir ! Ni nous mettre en marche !

 « Les portes étant verrouillées, Jésus Ressuscité était là au milieu d’eux, et leur dit : ‘’La paix soit avec vous !’’ » (Jn 20, 19).  

Tout dans ta Résurrection, Seigneur, semble nous inviter à une sorte de « cache-cache », de course poursuite, où c’est Toi le maître du jeu.

Tu fais dire aux apôtres d’aller en Galilée pour Te revoir, or en fait, le soir-même, c’est Toi qui vient chez eux alors qu’ils n’ont pas bougé. Tu viens nous rejoindre là où nous sommes, comme pour mieux disparaître, pour creuser en nous le désir de nous mettre en route,  assoiffés de Te retrouver. Ce faisant Tu nous promets de cheminer avec  nous, mystérieusement déjà présent à nos côtés, quand nous sommes unis dans ta quête.

Pour nous mettre en marche  vers la « Galilée » et pour te suivre, il nous faut recevoir la force de l’Esprit-Saint.  C’est ce que montre le contraste, saisissant, entre l’évangile de ce jour et la première lecture tirée des Actes. Ils nous font assister à  une métamorphose, une véritable résurrection  des disciples : eux, si abattus, apeurés, désorientés,  calfeutrés à double tour le soir de Pâques ; et les mêmes, au jour de la Pentecôte, capables de quitter leurs sécurités et de sortir sur les places publiques proclamer le salut  en la personne de Jésus Christ, et ce devant des foules ! Le même Pierre et ses onze compagnons, d’un côté comme de l’autre ! Il y aura fallu le don de l’Esprit. Déjà annoncé par Jésus lorsqu’il est apparu à ses disciples au soir de pâques et qu’il a répandu son souffle sur eux : « Recevez l’Esprit-Saint. » (Jn 20, 22)

Et si « la Galilée » que Tu nous indiques, Jésus,  était  … l’Eglise, ce « carrefour des nations » (Isaïe 8, 23) ? vers laquelle, Ressuscité, Tu nous convoques à venir ensemble pour Te trouver ou Te retrouver ? Et T’accueillir au plus profond de nos personnes, pour vivre de Ta Vie, formant un seul corps.

Alléluia ! Alléluia ! Loué sois-tu Seigneur, Toi qui nous donnes l’Eglise pour Te rencontrer, Toi le VIVANT !

Elle est notre Terre Promise, celle par qui tu nous enfantes à la Vie éternelle, et nous rends frères et sœurs. Elle est notre oasis, là où se trouve notre puits de Jacob, ton côté ouvert d’où coulent l’eau du baptême et le fleuve intarissable de l’eucharistie.

« Dans l’Église, le Christ ressuscité se rend présent et agit de manière privilégiée par les sacrements.

« L’Église est cette portion de l’humanité qui accueille et communique l’amour du Père pour tous les hommes.

Elle  est « en quelque sorte le sacrement, c’est-à-dire à la fois le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain » (LG 1).  

« Les sacrements sont des « actions du Christ et de l’Église » : des actes du Christ accomplis dans l’Église et par son ministère. Ce sont tous des actes d’Alliance qui unissent au Christ par l’action du Saint-Esprit, relient les hommes à Dieu et à leurs frères par le plus intime d’eux-mêmes, et incorporent à l’Église. Par eux, les hommes sont introduits et progressent dans le monde nouveau « pour connaître la liberté, la gloire des enfants de Dieu » (Rm 8,21) qui leur sont réservées à l’intérieur de la création renouvelée. » (n°359-360, Catéchisme des évêques de France)

L’Eglise est l’instrument que Jésus  a voulu pour nous rejoindre à travers Elle, et poursuivre son œuvre au milieu de nous et en chacun de nous  pour nous configurer toujours davantage  à Son Image, et que nous vivions toujours plus de sa Résurrection.

Tu nous donnes, Seigneur, en ces temps difficiles où nos liens sont bien éprouvés, de découvrir combien sont précieux, vitaux ceux que tu as patiemment tissés entre nous au sein de ton Eglise. « Carrefour des nations », toujours à parfaire, elle l’est car carrefour des classes d’âge, des origines, des statuts sociaux, professionnels, jeunes, enfants, veufs, étrangers, célibataires, époux ayant soufflé leurs noces d’or, jeunes fiancés, séparés, abandonnés, bien portants, malades, handicapés, personnes de la rue, … Oui nous avons pu expérimenter vivre, à notre échelle, au sein d’une communauté paroissiale qui s’est révélée une portion de cette  ‘’Galilée des nations’’ qu’est l’Eglise universelle, unie à l’Eglise du Ciel.

Donne-nous de pouvoir continuer à marcher ensemble  pour aller à ta rencontre, Ô Ressuscité !

Ton Corps, l’Eglise, est notre oasis. Donne-nous de  pouvoir à nouveau Te servir dans Ton Eglise, pour servir notre joie et la joie de nos frères et celle de ceux qui ne Te connaissent pas.

Alléluia ! Le Christ est ressuscité !

« A nous d’en être ses témoins. » (cf. Lc 24, 48)  

« C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que l’on reconnaîtra que vous êtes mes disciples. » (Jn 13, 25)    

Jean-Paul Grouès, diacre permanent