Un Amour plus fort que la mort …

 

Frères et sœurs, grande est notre joie de célébrer ce matin la Pâque du Seigneur, sa résurrection, cette vie nouvelle qui jaillit du tombeau dans nos cœurs apeurés et fermés !

Le Christ est allé jusqu’au bout de l’amour : il s’est laissé flageller, insulter, tourner en dérision, clouer sur la croix ; il a souffert pour chacun de nous, pour moi ; il est mort, il a été mis au tombeau …

Puis ce silence du samedi saint, un long samedi pour les Apôtres, sans rien faire car le sabbat interdit de se déplacer, enfermés au cénacle, sans doute à pleurer, tellement choqué par ce qu’il s’est passé …

Je n’ose imaginer le désarroi des Apôtres qui ont vécu 3 années avec Jésus, qui ont été témoin de ses miracles, de sa parole, qui ont confessé qu’il était le Messie, le fils du Dieu vivant … Apôtres qui se sont enfermés à double tour au Cénacle par peur et par tristesse …

Marie, la Vierge Marie, elle, en ce samedi saint a veillé dans la foi, une foi absolue, qui étourdit les plus audacieux …

 

Et voici le dimanche, le premier jour de la semaine ; c’était encore les ténèbres

Il fait encore sombre ; il est peut-être 4h00 ou 5h00 du matin …

Marie-Madeleine se rend au tombeau de grand matin.

Nous pouvons imaginer ses pas… : le pas typique de celle qui va au cimetière, un pas affaibli de celle qui ne se convainc pas que tout se soit fini de cette manière … Nous pouvons imaginer le visage pâle, baigné de larmes… Et la question : comment est-ce possible que l’Amour avec un grand A soit mort? 

Mais, à la différence des disciples, Marie-Madeleine est là – comme elle a accompagné le dernier soupir du Maître sur la croix ; elle est là encore, capable de sortir du cénacle, capable de ne pas fuir vers Emmaüs, capable de résister, d’affronter la vie telle qu’elle se présente et de supporter la saveur amère des injustices. Et la voici, devant le sépulcre, entre la douleur et l’incapacité de se résigner, l’incapacité d’accepter que tout doive finir ainsi pour toujours.

Dans le visage de cette femme au petit matin, il y a de nombreux visages, les visages de ceux qui se préparaient à recevoir le baptême hier soir ou ce matin, les visages de ceux éprouvés par ce carême, par ce confinement et qui ont soif d’une paix profonde, d’une délivrance, les visages de ceux écrasés par les ténèbres de la prison ou de l’addiction et qui ont soif de lumière, les visages de ceux qui attendent un pardon, les visages de ceux qui croient, avec toute la simplicité pure de leur coeur, que Dieu est plus fort que la mort et qui veulent renouveler ce matin leurs promesses de leur baptême.

Oui, cette femme ce matin nous voulons la suivre, nous laisser entraîner par elle, par sa foi naissante et par son amour.

Car elle ne vient pas pour embaumer le corps de Jésus ; dans l’Evangile selon Saint Jean il

nous est dit que cela a été fait vendredi, juste avant le Sabbat ; elle vient simplement parce qu’elle aime, et l’amour entretient vive la petite flamme de l’espérance qui habite son cœur. L’amour peut tout, l’amour croit tout, l’amour espère tout …

Elle vient car elle croit que l’Amour est plus fort que la mort

Nous aussi ce matin nous sommes là car nous aimons Dieu, car nous croyons à la victoire de l’amour …

Marie Madeleine vient en ce dimanche, en ce premier jour de la semaine ; car elle sait qu’au premier jour Dieu a créé la lumière ; et que les ténèbres ne l’ont pas arrêtée, que les ténèbres ne l’ont pas saisie ; car Dieu a séparé la lumière des ténèbres et que personne ne peut mettre la main sur la lumière …

Elle vient dans les ténèbres avec ce qui est ténèbres en elle, ténèbres ce mot qui s’écrit avec un « s » car elles sont nombreuses nos ténèbres ; mais elle vient aussi avec sa soif de lumière, de beauté, de vie …

Elle vient seule ; car c’est son secret à elle ; car l’amour exige d’être seul à seul avec l’époux ; car elle s’engage dans cet amour et n’a pas besoin du regard des autres ; elle vient pour une rencontre qui lui appartient, une rencontre personnelle mais aussi une rencontre qu’elle ne pourra pas garder pour elle-même : Va dire à mes frères lui dira Jésus …

Elle vient au tombeau et elle s’aperçoit que la pierre a été enlevée du tombeau. Non pas roulée mais comme le dit l’Evangile enlevée ; c’est terminé ; la pierre n’est pas juste à côté, elle n’est plus ici ou là, non  elle n’est plus tout simplement, inutile de la chercher, elle a disparu, elle ne reviendra pas.

 

La pierre a été enlevée : non pas pour que Jésus puisse s’échapper du tombeau ; il peut sortir même avec la pierre ; de fait il entrera au Cénacle alors que les portes sont fermées ; mais la pierre a été enlevée simplement pour que je comprenne qu’il n’est pas là, qu’il est ailleurs, qu’il me précède, que je ne peux mettre la main sur lui et qu’il ne mourra plus …

 

Il n’est pas ici. Voilà ce qui est écrit sur la pierre.. Sur le haut du tombeau, il n’est pas écrit  : ici repose ; mais il «est écrit : Il n’est pas ici … Car il est dans ton cœur, aujourd’hui, vivant. Où peut-il être si il n’est pas en toi pour toujours ?

 

D’ailleurs l’ange dira aux femmes : vous cherchez Jésus le crucifié … Eh bien vous vous trompez si vous cherchez un crucifié. Car il est ressuscité. Qu’est-ce que cela signifie si ce n’est qu’il est ailleurs et non là où vous le cherchez, si vous le cherchez dans ce qui est mort …

Et quand Marie-Madeleine verra Jésus, elles saisira ses pieds de peur de le perdre ; mais il lui dira : Sois sans crainte ; tu ne me perdras pas … Mais laisse-moi aller devant, laisse-moi t’entraîner dans la vie …

Et voilà alors que commence une course qui n’en finit plus : Marie-Madeleine court taper à la porte du Cénacle au petit matin ; il lui en fallu de l’énergie pour réveiller des Apôtres endormis de tristesse ou si apeurés qu’ils ont dû d’abord refuser d’ouvrir … C’est souvent à 5h00 du matin que s’effectuent les descente de police. Mais Marie-Madeleine est convaincante avec son amour qui ne laisse personne tranquille.

Son amour à elle aussi est plus fort que la mort.

Alors Pierre et Jean courent au tombeau et en arrivant au tombeau se font des politesses : Passe avant moi dit Jean à Pierre ; c’est le propre de l’amour que de vouloir laisser de la place à l’autre.

 

Pierre entre dans le tombeau.

L’autre disciple aussi : Il vit et il crut.

 

Il vit et il crut.

Ne retenez que cela aujourd’hui.

Il vit et il crut.

Oh sans doute que les linges y sont pour quelque chose.

Et que l’Ecriture va éclairer cette foi …

Mais ne retenez que cela.

Il vit et il crut.

Jean, le Bien-aimé a suivi Jésus 3 ans et l’a vu mourir sur la croix ; il  ne peut que croire ; car c’est d’amour dont il est mort …

 

Il dira plus tard : Nous avons cru à l’Amour. Celui manifesté sur la croix.

Cela me suffit.

Car je fais confiance à des témoins, à des témoins qui ont en réponse donné leur vie, à Pierre, Jean et Marie-Madeleine et tant d’autres.

 

Le Christ est vraiment ressuscité !

Je le crois fermement !

Etre chrétien c’est cela, c’est croire que l’Amour l’a emporté !

Et je demande pour chacun de nous la grâce de vivre en ressuscité, comme Saint Paul nous le dit : Avec le Christ vous êtes vraiment ressuscité !

C’est-à-dire capables avec votre amour d’ouvrir toutes les portes fermées, de toucher les cœurs endurcis ; d’annoncer au monde entier la joie de la résurrection …  et pour cela il n’y a pas besoin de dérogation !

 

Amen

Père Patrice Guerre, curé de l’ensemble paroissial Saint Pothin – Immaculée Conception