« Jésus fut bouleversé en son esprit »

Comment ne pas être saisi aux entrailles par la douleur de Jésus, la douleur de Dieu, en ces derniers jours qui précèdent la Passion ?

Douleur de l’échec : tout ce que Jésus a annoncé et enseigné pendant ses trois années de vie publique, pendant toutes ces heures passées au Temple est rejeté, mis à bas. Est-ce que j’entends ce cri déchirant « je me suis fatigué pour rien, c’est pour le néant, c’est en pure perte que j’ai usé de mes forces » ?

Douleur de l’humiliation : les mains qui, il y a peu, brandissaient des rameaux sont chargées de pierres, ces bouches qui chantaient « hosanna » s’apprêtent à hurler « A mort » !

Douleur de la trahison : Judas, un des douze, l’un de nous, va le livrer à ceux qui cherchent à l’abattre depuis des mois,

Douleur de la solitude : Jésus abandonné peu à peu par ses disciples, à commencer par Pierre, va s’avancer seul vers la Croix …

Comment ne pas être saisi aux entrailles par l’obéissance de Jésus à la volonté de son Père, par sa confiance absolue en la présence et en l’amour de son Père, le roc et la forteresse d’où il tire sa force, par sa détermination à aller jusqu’au bout de l’annonce du salut pour toute la terre, jusqu’à donner sa vie pour nous donner la Vie ?

Alors devant Jésus bouleversé, devant Dieu bouleversé, où suis-je aujourd’hui ?

Suis-je avec les disciples déjà apeurés et prêts à quitter cette barque qui prend l’eau de toute part ? Suis-je déjà loin de la scène ?

Ou suis-je prêt à me tenir auprès de Lui contre vents et marées, à vivre avec Lui, tout contre Lui, ses derniers jours, ses dernières heures, aujourd’hui et tout le reste de ma vie ? Car chaque fois que la terre est meurtrie, que l’homme est blessé, que l’amour est bafoué, que la haine et la violence, l’égoïsme et le désir de posséder l’emportent, je le sais, le Christ revit les jours de la Passion.

Seigneur, tu connais ma pauvreté, tu connais mes faiblesses, tu connais mes fragilités, tu connais mes lâchetés. Face au mal que tu affrontes Seigneur, je ne suis pas d’un grand secours ; mais de tout mon être, de tout mon esprit, de toute mon âme, je t’offre humblement ma présence.

Et me glissant dans le fin murmure du silence divin, j’ose dire « je T’aime ».

Frédéric Subra, candidat au diaconat permanent