Homélie pour la 1° messe de Pierre-François

  • Depuis hier matin, en nos cœurs, résonne cette parole, cette très grande joie : Pierre-François est prêtre !
  • Tout prêtre se souvient de ses premiers moments de son sacerdoce où il s’exclame, se sentant dépassé : « Je suis prêtre ! ». Le Père Marie-Eugène, écrit, 3 ans après son ordination : « Je suis prêtre… ce seul mot suffit à mon bonheur ! » et 4 jours avant sa mort, on lui apporte le calice et il murmure : « Je suis prêtre ! »
  • Saint Jean-Paul II disait : « Les prêtres, vous le savez, ont une place spéciale dans mon cœur et ma prière. C’est normal : avec vous, Je suis prêtre ».
  • Et je comprends que Pierre-François n’ait pas voulu aujourd’hui prêcher pour tout entier n’être qu’à l’écoute de la Parole de Dieu, de Dieu qui lui dit : « Tu es prêtre », comme le proclame le psaume 109 chanté chaque dimanche soir dans l’office : « Tu es prêtre à jamais selon l’ordre du roi Melchisédech ».
  • « Tu es prêtre »
  • Car si dire « Je suis prêtre » est vertigineux, difficile à cerner, c’est parce qu’il faut d’abord sans cesse entendre Dieu et l’Eglise me dire : « Tu es prêtre » ; tu es un don pour nous ; je t’ai voulu ; comme la rosée qui naît de l’aurore, je t’ai engendré poursuit le psaume ; comme la rosée, tu es prêtre, engendré de manière mystérieuse, engendré comme la rosée matinale dont on ne sait d’où elle vient si ce n’est qu’elle vient de la nuit, de la nuit traversée par le Christ qui nous donne cette rosée, cette eau vive faite d’eau et de sang ; eau rosée qu’il nous donne à l’aurore de l’Eglise, à l’aurore de nos vies.
  • « Tu es prêtre », voilà la Parole de Dieu par excellence qu’aujourd’hui nous entendons, qui résonne en ce jour, que Dieu nous dit ; voilà la Parole que nous proclamons, voilà la Parole que nous confessons.
  • « Tu es prêtre » : Voilà ce que nous sommes chargés de te dire, Pierre-François, voilà ce que vous, chers paroissiens de Saint-Pothin et de l’Immaculée vous aurez à faire découvrir à Pierre-François, en l’enfantant à sa vie sacerdotale, en lui demandant d’être prêtre, en lui faisant découvrir et devenir ce qu’il est.
  • « Tu es prêtre », voilà ce que Dieu dit et redit à tout prêtre, spécialement chaque dimanche soir, dans ce psaume 109 ; « tu es prêtre ; au torrent, tu t’abreuves en chemin », au torrent de l’Eucharistie que tu as la joie de présider aujourd’hui pour la première fois …
  • « Tu es prêtre à jamais », dit le psaume, comme l’époux l’est pour son épouse : prêtre pour toujours, prêtre pour l’éternité, prêtre jour après jour, époux pour son épouse, l’Eglise.
  • « Tu es Prêtre à jamais, siège à ma droite », dit le psaume, à la place du préféré, du bien-aimé.
  • « Tu es prêtre », alléluia !
  • Mais comment grandir dans cette vie de prêtre, comment devenir ce que le prêtre est ? A un enfant, on apprend à marcher, alors voilà ce que je voudrais très simplement dire en reprenant les lectures de ce jour, (en regardant la figure de Zacharie un prêtre qui a été appelé à exercer la paternité et en regardant celle de Jean-Baptiste)
  • Je voudrais retenir 4 balises :
  • La première : Zacharie, prêtre a appris la paternité durant 9 mois de silence …
  • La 1° balise d’une vie de prêtre c’est bien sûr sa vie de prière ; on attend du prêtre qu’il prie, qu’il soit un homme de Dieu, un homme qui vive pour Dieu. Prêcher la Parole jour après jour demande de l’avoir accueillie dans un cœur qui soit à l’écoute.
  • La croissance d’un prêtre dépend de ce silence qu’il donne à Dieu.
  • Et si Zacharie a été 9 mois en silence l’Evangile de ce jour nous dit aussi que JB se rendit au désert jusqu’au jour où il se fit connaître à Israël.
  • Au torrent, il s’abreuve en chemin, chante encore ce même psaume 109.
  • Le prêtre doit se nourrir de Dieu, en chemin, c’est-à-dire à chaque instant.
  • Chers amis, priez pour que vos prêtres prennent le temps de se nourrir, de s’abreuver en chemin !
  • Se nourrir du pain de l’Eucharistie, centrale dans la vie de l’Abbé Pierre-François, Eucharistie qu’il va célébrer tous les jours de sa vie, proclamant comme Jean-Baptiste : « Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde ! »
  • Se nourrir de la Parole de Dieu, des sacrements donnés et reçus.
  • Se nourrir de ce qui est mystérieusement donné à travers une confidence, le partage d’une souffrance, une confession, un témoignage de foi …
  • Se nourrir du Christ.
  • Saint JP II disait à des prêtres : « Votre premier devoir est d’être avec le Christ. Un danger constant pour les prêtres, même s’ils sont zélés, c’est de tellement s’immerger dans le travail du Seigneur qu’ils en oublient le Seigneur du travail. Nous devons trouver, créer le temps de rencontrer le Seigneur dans la prière. A l’exemple du Seigneur Jésus, nous devons nous retirer dans les lieux déserts pour prier. Ainsi, nous recevons l’amour du Seigneur pour le donner.
  • Nul ne peut prétendre aimer s’il ne se laisse aimer par le Seigneur, longuement. »
  • Dans ce silence intérieur, le prêtre redit à Dieu sa disponibilité, disponibilité à rejoindre la croix du Seigneur, croix qui demande une confiance absolue.
  • La 1° balise du prêtre, c’est celle de la foi qui est disponibilité, c’est celle de la foi liée au mystère de la croix, là où je peux plus rien, comme Zacharie qui ne pouvait plus parler. Balise fondatrice.
  • Je vous invite à prier pour que Pierre-François soit fidèle à cette balise, à se tenir au pied de la croix, disponible et confiant.
  • Cette croix pour Pierre-François, il la rejoint aussi par sa maladie, et nous savons la fécondité que cela assure à sa vie.
  • 2° balise : Durant ces 9 mois de silence, Zacharie s’est aussi reconnu pécheur puisque s’il est muet lui dit l’ange c’est qu’il n’a pas suffisamment cru à la Parole qui lui a été adressée …
  • Combien cela est douloureux pour le prêtre de se reconnaître pécheur … de sentir ce décalage entre ce qu’il est et le cadeau de l’ordination qui lui est confié …
  • Vous aurez sans doute remarqué que durant la messe, le prêtre se reconnaît d’abord pécheur, au milieu de ses frères, en commençant par ces mots : Je reconnais devant mes frères que j’ai péché… C’est la seule parole publique de la liturgie avec « Seigneur je ne suis pas digne de te recevoir » où le prêtre dit « Je » ; tout le reste de la messe il dira « nous » … Au fond durant la messe le prêtre ne se présente que comme pécheur …
  • Il est bon pour le prêtre de se reconnaître pécheur, appelé à la sainteté avec ses frères.
  • Il est bon de se reconnaître pécheur pour demeurer dans l’humilité qui est la force des saints.
  • Je sais que Pierre-François est très conscient de cela aimant à dire, je le cite : « Si vous croyez que Bibi va s’en sortir tout seul … Il a besoin d’un Sauveur ! »
  • Au fond, nos imperfections, nos manquements, qui sont réellement crucifiants pour nous, sont sans cesse un appel à dire au Christ : « Sans toi, je ne peux rien »
  • Cette balise qui est de nous reconnaître pécheur est précieuse car elle nous donne de nous approcher avec un regard de miséricorde du pécheur qui vient se confesser.
  • 3° balise : Zacharie est devenu père …
  • Il a été capable de nommer d’un nom nouveau cet enfant qui lui a été donné, de regarder d’une manière nouvelle cet enfant, non pas comme la répétition de lui-même ; Zacharie n’est pas père d’un clone ; mais père qui engendre son fils pour lui-même
  • Apprendre à être père, devenir père, enfanter à la vie divine est la joie et le défi de la vie du prêtre.
  • Le prêtre n’est pas prêtre parce qu’il est un bon chrétien ou pour être un bon chrétien, un chrétien qui prie et qui a une juste conduite ; il est prêtre pour donner les sacrements ; s’il n’y a plus de prêtre qui célèbrera l’Eucharistie ? Qui confessera ? Il est prêtre pour prêcher la Parole, pour l’annoncer à tous. Il est prêtre pour faire grandir dans l’unité la communauté qui lui est confiée.
  • En tout cela il est père.
  • Devenir père demande d’abord une incessante conversion du regard.
  • Le prêtre est un homme qui espère pour ceux qui n’espèrent plus.
  • Il est Père pour ses enfants ; il les aime comme un père, les espère comme un père, quitte à attendre longtemps le retour du fils prodigue. Il leur donne les sacrements, les enseigne, leur apprend à vivre dans l’unité.
  • La paternité du prêtre s’exerce en cultivant un regard bon sur l’homme, un regard qui élève au lieu d’abaisser, un regard qui rend grâce avant de juger, un regard qui se réjouit par avance de toute rencontre, un regard qui voit Dieu en tout cœur humain.
  • Un regard aussi qui attend, qui désire le meilleur de l’autre.
  • Etre prêtre, c’est être père…
  • Vous le savez bien, frères et sœurs, cette paternité, le prêtre l’exerce au nom du Seigneur ; elle ne lui appartient pas, d’où le sens de son célibat ; elle est féconde dans la mesure même où elle est un don d’en haut.
  • Le prêtre est appelé à exercer cette paternité envers tous, envers ceux qui sont facilement aimables et ceux qui le sont moins, ceux qui sont proches et ceux qui le sont moins ; il fait sien cette parole de la prière eucharistique : Ramène à toi Père très aimant tous tes enfants dispersés…
  • Chers amis, priez pour que Pierre-François devienne ce qu’il a reçu, père de tous, posant sur chacun un regard de bonté et d’espérance.
  • Priez aussi pour que vous le reconnaissiez comme père …
  • Qu’il puisse dire comme Saint-Paul aux Thessaloniciens : « Nous voulons livrer pour vous notre propre vie tant vous nous êtes devenus chers »
  • En chaque eucharistie qu’il puisse dire en vérité : ceci est mon corps livré pour vous, mon sang versé pour vous…
  • La 4° balise est celle du désir sans cesse renouvelé de proclamer la bonne nouvelle du salut.
  • Le Serviteur de Dieu proclamait dans la 1° lecture : « Ecoutez-moi, îles lointaines ! Peuples éloignés soyez attentifs ! Il a fait de ma bouche une épée tranchante, il a fait de moi une flèche acérée. »
  • Annoncer l’Evangile est la grâce et la vocation de l’Eglise, et particulièrement de tout prêtre ; on peut dire que le prêtre n’existe que s’il évangélise ; on peut dire que s’il craint ou s’il oublie ce primat de l’annonce de la bonne nouvelle, alors il court le risque de ne plus être disciple du Christ.
  • Il est appelé à se fatiguer pour cela …
  • Alors parfois il sera tenté de dire car les épreuves et les contradictions ne manqueront pas, comme le serviteur d’Isaïe : « Je me suis fatigué pour rien, c’est pour le néant, c’est en pure perte que j’ai usé mes forces »
  • Que ces moments de déception, de découragement ne servent qu’à entendre le Seigneur redire au fond de notre âme : « Je fais de toi la lumière des nations pour que mon salut parvienne jusqu’aux extrémités de la terre … »
  • Ou comme le dit Zacharie à propos de Jean-Baptiste : « Tu seras appelé prophète du Très-Haut pour donner à son peuple de connaître le salut »
  • Que l’Esprit du Seigneur soutienne toujours Pierre-François pour en faire son témoin courageux !
  • Chers amis, concluons en regardant Marie, mère des prêtres et en la priant.
  • Marie, Mère du prêtre qui se tient au pied de la croix dans le silence et la confiance,
  • Marie, Mère du prêtre qui regarde tout homme avec bonté comme elle-même regardait tout homme ainsi, le couvrant d’un voile de miséricorde, comme la chasuble du prêtre qui signifie ce manteau de la miséricorde
  • Marie, Mère du prêtre qui reçoit sa nourriture de la main du Père, qui se laisser couvrir par l’Esprit Saint, amour infini, pour donner l’Amour au monde,
  • Marie, Mère du prêtre qui entre dans le combat contre le mal pour conduire au Christ tout homme.
  • Marie, notre Mère, nous te confions ton enfant très cher Pierre-François.
  • Amen