Suis-je le gardien de mon frère ?

La Bible nous montre combien la vie fraternelle ne va pas de soi : à Dieu qui lui demande où est son frère Abel, Caïn lui réplique : « Suis-je le gardien de mon frère ? ». L’Evangile de ce dimanche nous propose la parabole du riche et de Lazare où l’on comprend que cette indifférence à notre prochain est le résultat d’une surdité à la Parole de Dieu. Si nous écoutons Moïse, les prophètes (et les Evangiles) et les mettons en pratique, cela change notre regard sur ceux que nous côtoyons.

Les Fraternités Pentecôte ont ouvert leur porte lundi 19 septembre pour nous exercer à cette vie fraternelle à laquelle nous sommes tous convoqués. Je retiens quatre points de cette parabole qui parlent de fraternité.

L’anonymat du riche : le texte que nous entendons n’attribue aucun nom à cet homme riche. Cette omission est comme une ombre qui planerait sur nous, inquiétante : serait-ce moi, ce riche anonyme ? En effet, le rythme quotidien nous laisse bien des fois dans l’ignorance des personnes que nous croisons. Sans parler de nos assemblées dominicales où c’est peut-être une personne anonyme
avec laquelle nous échangeons le geste de paix. Tous les 15 jours, les fraternités Pentecôte nous donnent des frères et sœurs : ils ont un visage, un nom, une histoire.

L’indifférence, un abîme infranchissable : Le texte n’attribue ni vice ni vertu au riche comme au pauvre Lazare. Ce qui condamne le riche, c’est son indifférence : son portail fermé à la détresse de Lazare. Je peux connaître le nom du pauvre qui est à la porte de l’église mais rester fermé à son malheur. Comment mieux ouvrir mon cœur, mon oreille, mon temps à cette sœur, ce frère qui m’est donné autrement qu’en priant pour lui, vraiment ? Se répand aujourd’hui dans l’église la pratique de ce que l’on appelle la « prière des frères » où l’on expérimente la force de cette fraternité vécue.

Le partage du repas : rien des festins du riche n’arrive jusqu’à Lazare. La parabole situe le drame dans cette absence de partage. Il y a dans le partage d’un repas une grâce cachée : je reconnais en moi cette faim, cet appétit qui est un manque que chacun vit. Et je partage le subtil langage des goûts et de la satiété… Un buffet partagé ouvre les soirées des fraternités Pentecôte.
La Parole de Dieu : Elle est terrible cette dernière phrase de la parabole : “S’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne seront pas convaincus. »

Dieu nous parle par les prophètes et, pour nous aujourd’hui, par les Evangiles. Ecouter cette Parole pour en vivre est un apprentissage et il est nourrissant de l’expérimenter avec des frères et sœurs.

Au-delà des bienvenus apéritifs de fin de messe, comment se reconnaître frères et sœurs en communauté paroissiale ? Par-delà nos sensibilités religieuses et nos goûts, se rencontrer régulièrement en dehors de la messe, voilà qui affermit notre cœur pour répondre : « oui, je suis le gardien de mon frère ! »

Bertrand de Montclos, diacre permanent.