Bientôt la fête de la Toussaint …

 

La sainteté pour faire « le plein » de bonheur !

 

Un saint est-il un personnage triste, qui ne sait pas goûter à la vie, qui passe son temps à se priver de tout et à s’infliger des pénitences ?! Si cette idée de la sainteté traîne en votre esprit alors prenez vite soin de l’enlever …

Prendre le chemin de la sainteté c’est marcher vers le vrai bonheur … Sur l’étendard du Christ est gravé en lettres de feu « Heureux … » !

Ce bonheur est déconcertant parce qu’il ne s’oppose pas au chagrin ; en effet le contraire de la joie n’est pas la tristesse mais la dureté de cœur, un cœur de pierre. La sainteté, c’est un cœur de chair, un cœur nouveau.

C’est dans ce cœur de chair, dans le creux de notre désir, dans l’espace laissé à l’autre, dans la reconnaissance de nos duretés et de nos souffrances que se glisse l’appel à être heureux, à être saints, à aimer car cela est synonyme ! Et cet appel est pour tous !

 

La sainteté dans la chair !

 

Si Dieu a créé le printemps qui trouble toute chair en ce monde, si les fleurs sont de toutes les couleurs, si la multitude infinie des visages nous fascine, c’est bien pour nous dire que cet appel au bonheur cherche à s’infiltrer dans les milles facettes de nos vies. L’Eglise appelle cela : « l’Incarnation ».

La chair et la sainteté semblent de loin irréconciliables. Or plus on s’approche des saints, plus on découvre qu’ils ont laissé pénétrer en eux la lumière divine. La star brille d’elle-même attirant à elle au risque d’exposer son corps, le saint illumine à partir d’un autre, jusqu’en son corps qu’il donne et qui devient lui-même lumière ; un des signes tangibles de la sainteté est justement le corps du saint qui demeure sain après sa mort …

Alors oserons-nous parler d’incarnation du bonheur pour dire que ce bonheur en toutes choses définit la sainteté ? Oserons-nous dire aujourd’hui que la sainteté va jusqu’à se vivre dans le quotidien et même dans la chair comme lieu de l’accueil et du don ?

Le signe que la sainteté affleure est le visage lumineux du vieillard attendri où des larmes ont creusé les plus belles rides qui soient … Des larmes d’humanité, des larmes fruits de la joie et de l’émerveillement de toutes nos rencontres toujours imméritées, des larmes versées sur la souffrance d’un enfant, des larmes qui lavent et purifient, des larmes rejointes par ces mille petites larmes d’eau bénites versées sur le corps du baptisé qui vient de naître ou sur le corps du défunt au soir de sa vie … Car toute chair est sainte par la grâce de Dieu ! Sauf à trahir la chair ou la grâce, ce qui est tout un … A nous de présenter à la grâce notre chair !

 

Je n’ai pas envie d’être saint …

 

Il nous faut cependant reconnaître que le désir d’être saint n’est pas très vivace en nous … Et même si nous avons saisi que la sainteté et le bonheur ne s’opposent pas, même si nous avons chassé toutes les fausses idées sur la sainteté qui peuvent exister en nous, il nous est difficile de tendre à la sainteté, de la désirer vraiment, de nous orienter à nouveau vers ce projet de Dieu en nous.

Pourtant « Renoncer à garder au cœur le désir de la sainteté serait une ultime trahison envers Dieu et envers le monde » (Jacques Maritain)

« Je n’ai pas envie d’être un saint » est sans doute encore le cri infantile de notre nature blessée incapable de s’appuyer sur la miséricorde et sur l’espérance que Dieu a pour nous …

Etre un saint, c’est le projet de Dieu pour moi aujourd’hui et demain : Qui suis-je pour y renoncer ?

 

                                                                               Père Patrice Guerre, curé de Saint Pothin et de l’Immaculée Conception